Votre respiration influence votre posture
Vous avez sans doute déjà remarqué à quel point il vous est aisé de reconnaître de manière catégorique une personne connue qui s’approche. Les ondulations des contours, certains mouvements, la démarche, un port de tête vous font deviner qui est en train de monter l’escalier, le facteur ou votre grand frère. Parfois le son des pas, ou d’autres signaux vous permettent même de déterminer l’humeur qui l’habite. Ce qui est fascinant c’est que nous utilisons rarement cette capacité de reconnaissance pour nous-même. A l’aide de quelques exercices d’exploration corporelle vous allez vous mettre à l’écoute des énergies, des rythmes, des humeurs et des formes de vos propres mouvements et ainsi déterminer comment vous stabilisez votre corps dans l’espace en lien avec la gravité. Une de ces explorations implique une activité qui modèle notre posture en permanence, vous l’avez deviné je veux parler de la respiration. Une autre activité déterminante c’est votre démarche, dont je parlerai dans un autre article.
Chaque jour nous effectuons 20 000 cycles respiratoires et au moins 10 000 pas. Marcher et respirer sont tellement enracinés dans nos comportements que la plupart d’entre nous ne peuvent imaginer que ce sont là des habitudes qui peuvent nécessiter quelques menues évolutions. Cependant, en marchant et en respirant comme nous le faisons, nous perpétuons nos habitudes posturales, qu’elles soient bonnes ou mauvaises.
Les mouvements de la respiration varient en fonction de ce que vous faites. Vous ne respirez pas pareil quand vous dormez et quand vous courez après le bus. La plupart du temps respirer est automatique, vous n’avez pas à y songer. Cependant vous pouvez aussi contrôler votre respiration et cela vous permet de chanter, jouer de la flûte ou plonger en apnée. Dès que vous portez votre attention sur votre respiration le mouvement involontaire s’interrompt. L’exploration qui suit va donc vous donner une idée approximative de votre respiration inconsciente mais en développant un peu de curiosité à l’égard de celle-ci vous pourrez certainement avoir une idée plus précise de vos habitudes involontaires.
Votre respiration neutre
Asseyez-vous confortablement pour faire l’exercice. Observez votre inspire et votre expire pendant un certain temps. Soyez curieux, en plus des sensations de l’air dans votre bouche, vos narines et votre gorge, notez dans quelles autres parties du corps le mouvement de la respiration peut être ressenti. Fermez vos yeux pour une meilleure concentration et continuer ainsi durant quelques minutes. Puis reprenez la lecture…
Vous avez sans doute senti les mouvements de votre ventre, l’élargissement au niveau de vos côtes, votre poitrine qui monte et qui descend, peut-être avez-vous senti les déplacements de vos omoplates dans votre dos ou leur léger mouvement d’élévation à l’inspire. L’impression que tout le corps se gonfle à l’inspire et se rétracte à l’expire. Comme dans le corps tout est connecté à tout vous avez certainement eu des sensations très éloignées des poumons comme dans les mains, le bassin, les jambes ? Même si ça n’est pas le cas, sachez qu’une telle finesse est possible.
Lorsque la respiration est tranquille, l’expire survient lorsque le diaphragme se relâche. En présence d’activité ou de stress vos muscles abdominaux aide le diaphragme à expulser l’air des poumons. Lors d’un expire forcé, ces muscles compressent votre abdomen comme par exemple lorsque vous faites le marathon de Paris, lorsque vous riez ou toussez. Essayer de toussez et regarder comme la contraction des muscles du ventre maintien votre diaphragme en haut de votre cage thoracique.
Une bonne tonicité des muscles de l’abdomen soutien la colonne vertébrale et participe à une bonne digestion et une bonne respiration. Cependant des tensions constantes dans ces muscles empêchent le diaphragme de descendre complètement et bloquent l’élévation naturelle de la colonne vertébrale. De telles tensions se développent souvent en essayant de paraître mince, en faisant des exercices de renforcement abdominal de manière incorrecte, lors de réactions émotionnelles ou bien à la suite de problèmes organiques, digestifs par exemple.
Votre respiration et le stress
Reprenez les bases de la pratique précédente, et maintenant pensez à une situation légèrement stressante ou irritante pour vous, un passage d’examen, un rendez-vous d’embauche, ou encore vous rentrez des courses et vous avez oublié ce truc important qu’il vous fallait absolument pour votre réception de ce soir. Prenez une situation en lien avec votre vécu personnel et habitez la, incarnez la, fermez les yeux, vivez la vraiment pendant quelques instants….
Maintenant retournez à l’observation de la respiration. Est-ce que l’amplitude est la même ? est-ce que les zones atteintes par la respiration sont les mêmes que lors de la respiration neutre ? Avez vous senti les même amplitudes thoraciques ? étiez vous disponibles à votre environnement ?
Pour la plupart d’entre vous, ce moment de stress a probablement « fermé » le corps et l’esprit. Le diaphragme, le muscle le plus important de la respiration, a été mobilisé pour stabiliser votre posture dans le stress et ce n’est certainement pas sa fonction. Les cycles inspire/expire sont devenus plus courts même s’il y a pu avoir un soupir.
La cuirasse musculaire
En voulant contrôler les situations stressantes, nous contractons souvent nos muscles d’une manière qui bloque le mouvement plutôt que de le créer. Ces muscles deviennent alors une sorte de cuirasse qui restreint notre capacité à nous mouvoir librement.
Observez ce qui se passe lorsque le champion de tennis est habité par le stress, ses mouvements deviennent moins fluides, moins justes, c’est la même chose pour le musicien pris par le trac. L’armure musculaire est une réaction de défense du corps destinée à rendre votre corps plus ‘solide’. Cependant, cette solidité entame la fluidité et la grâce naturelle du corps. Les tensions générées peuvent aller très profondément à l’intérieur du corps et affecter toutes les structures organiques.
Nous n’avons pas tous à notre dispositions un bon coach pour nous inviter à la détente par ses mots bien choisis ou par des grands massages de détente qui redonne la fluidité au corps. Lorsque les réactions de stress tournent à l’habitude, votre respiration change et modifie considérablement votre posture et votre mobilité, en conséquence votre qualité de vie est affectée. La bonne nouvelle, c’est que l’habitude de laisser s’incarner les attitudes du stress peut être changée.
Et le plaisir alors !
L’exploration qui suit devrait contrecarrer les résultats de la précédente ! Ouf je vais pas vous laisser avec les tensions inscrites par cet épisode de stress.
Cette fois ci, évoquez un moment de plaisir simple, un parfum que vous appréciez, un lever de soleil particulièrement délicieux, la vision d’une personne aimée, l’odeur d’une brioche tout fraîche sortie du four et laissez votre corps s’imprégner de cette sensation. Ne reprenez la lecture que lorsque votre corps aura complètement incarné la sensation de ce plaisir simple.
Vous avez certainement remarqué une différence dans la respiration avec l’expérimentation précédente ? La respiration a probablement été plus longue, plus profonde et plus complète. Les autres sensations accompagnant le plaisir sont souvent un sentiment d’ouverture dans la gorge notamment, un adoucissement des traits du visage, un relâchement des tensions de l’abdomen en même temps qu’un sentiment général d’expansion, d’élargissement. En général votre corps a pu se sentir plus ouvert, plus fluide et peut-être plus vulnérable.
Le sentiment de vulnérabilité peut demander un temps d’acclimatation, surtout si votre vie mondaine est importante. Laisser votre corps exprimer sa mobilité et sa fluidité naturelle peut générer des sensations d’insécurité, d’embarras voire de honte. mais cela peut aussi encourager votre créativité et votre autonomie. La plupart d’entre nous avons été incités dès notre plus jeune âge à restreindre notre vivacité, nos élans de plaisir et d’exubérance et à nous asseoir sagement sur les bancs de l’école. Bien que des études suggèrent que l’on apprend mieux lorsque le corps est autorisé à bouger, notre société continue d’associer la libre expression du corps à un manque de discipline voire et à une sorte de régression culturelle.
Le processus d’amélioration des postures peut donc s’appuyer sur la capacité intrinsèque du corps à aller vers l’expansion et la fluidité. Cette capacité est réveillée et alimentée entre autre par la qualité de notre respiration. L’écoute du corps et l’attention à la respiration, conduisent à la prise de conscience de comment nous fonctionnons et constitue un élément déterminant de tout processus de changement postural.
Richard
Référence : The new rules of posture – Mary Bond – Healing Arts Press